Nouvelles des Navigateurs

Ce blogue a été conçu par Nycole - VE2KOU et se veut un point de rencontre
entre les navigateurs, familles et amis du Réseau du Capitaine et de la CONAM.

jeudi 22 mars 2007

ZEN - Monique Joly et Michel Lopez

Oh là là - çà faisait un bon bout de temps que je n'avais entendu parler d'eux - quel plaisir de vous faire partager ce message :


Entre l’aube

Et l’aurore

En Caroline du Nord
Dans le clair-obscur entre l’aube et l’aurore,
Toute image est mirage dans les marais
De la Caroline du Nord

Où finit le ciel ? Où commence la lagune ?

L’horizon trace une ligne entre les deux miroirs

La terre est-elle la terre quand les sables sont mouvants ?
Où est donc la frontière quand va et vient la marée ?
Est-ce un arbre mort ou un alligator ?
Le héron dort-il ou est-il à l’affût ?
Un pan de roseaux se détache lentement de la berge.
Serait-ce une île flottante ? C’est une chaloupe camouflée.
Fondus dans le décor, les chasseurs attendent un vol de canards.

Le temps est lent dans ces longues landes d’eau.

Les arbres immobiles prennent des airs de savane.

Est-ce encore le nord ? Est-ce déjà le sud ?
En ce matin de novembre, le soleil qui se lève
Fait changer de pays et de saison.


Gulf Stream


Nous avons traversé le Gulf Stream entre la Floride et Cuba trois jours avant Noël. Nous l’avons retraversé entre Cuba et le Mexique la veille du Jour de l’An. Nous le retraverserons entre le Mexique et la Floride. Espérons avant Pâques.


Le Gulf Stream à Key West, Floride, le 22 décembre 2006

La route s’arrête à Key West. Les Keys de Floride vont encore égrener quelques îlots coralliens jusqu’aux îles Dry Tortugas, mais le fudge, la Budweiser, le forfait de cellulaire voix/données de Bell s’arrêtent à Key West.

Au bout du quai : le Détroit de Floride qui sépare l’Empire du Bien de Bush de l’Axe du Mal de Castro. Au milieu du détroit coule le Gulf Stream, puissant fleuve marin qui pique des pointes de 4 nœuds et se rapproche parfois à 20 milles nautique de la côte. Venu de l’arc des Antilles après une traversée de l’Atlantique, il remonte le long de la Floride direction est/nord-est. Comme ZEN pousse des pointes de 6,5 nœuds, et que son cap vers La Havane le met nez à nez avec le courant, il faut user de stratégie pour ne pas faire du sur-place. Les conseillers en stratégie de traversée ne manquent pas. Certains interdisent tout vent du nord, qui prend le courant à rebrousse-poil et le hérisse de vagues hargneuses. D’autres recommandent un vent du nord après le passage d’un front froid qui donne un bon vent portant à partir des îles Dry Tortugas sur une mer encore affolée par le passage de la dépression.

Au bout du quai, il y a aussi des histoires de US Coast Guard qui arraisonne les bateaux en mer, de balseros cubains qui fuient sur des radeaux de la Méduse, de narcos qui filent dans la nuit à bord de speed-boats, de cargos aveugles pilotés par des ordinateurs, de patrouilles de la Guarda Frontera communiste.

Au bout du quai, il y a aussi ZEN et son vaillant équipage qui met un orteil à l’eau avec un petit pincement d’angoisse. L’appréhension n’est que de courte durée. La météo force la donne : attendre une semaine la fin d’un front froid venu du Texas ou filer avant le front pour être à Noël à Cuba. Nous ajoutons une nouvelle stratégie de traversée : un vent est/sud-est de 15-20 nœuds pour nous pousser par le travers sur un cap de 250O vers la marina Hemingway à 20 milles à l’ouest de La Havane. Branle-le-bas de combat à bord, nous avons juste le temps d’envoyer quelques courriels de Joyeux Noël prématurés.

Nous partons le 22 décembre à 13 heures de Key West pour une traversée d’une centaine de milles nautiques. Ni cargos, ni balseros, ni narcos. Nous ne croisons pas âme qui vive. Une seule présence qui accélère notre pouls : un bâtiment de taille moyenne qui s’approche à bâbord sur notre écran radar. Aucune réponse malgré notre demande de communication radio. Le vaisseau non identifié nous colle à un mille pendant une vingtaine de minutes, puis change de cap dans la nuit noire de lune tardive. RAS. Nos yeux s’accrochent à des îlots d’étoiles dans les nuages dans l’espoir que l’avant orageux du front froid ne nous rattrape pas. Les éclairs menacent sur la côte de Floride que nous laissons dans notre sillage. Nos bonnes étoiles nous accompagnent dans un ciel de plus en plus cubain.

Au soleil levant, La Havane se dessine sur l’horizon. Nous hissons côté tribord l’étoile de la bandera cubana, le pavillon cubain.


Le Gulf Stream à Cabo San Antonio, Cuba, le 31 décembre 2006


Cabo San Antonio est à la fois le bout de l’île de Cuba et le bout du monde. Nous y parvenons après une descente musclée de 28 heures en provenance de La Havane, à 20 milles au large, pas plus loin pour ne pas croiser le Gulf Stream, mais bien à l’écart de la barrière de corail qui longe la côte nord de Cuba. Le vent passe du nord-est à l’est dans la nuit. Nous arrivons épuisés par une approche finale au près qui n’en finit plus. Nous attendons deux jours l’accalmie dans ce finistère de plages désertes où les deux douaniers, le gérant de la marina à deux places et les trois pêcheurs se racontent les mêmes histoires. Ils nous échangent un barracuda contre une bouteille de rhum. Nous risquons de finir l’année sur cette pointe, cible de tous les ouragans en saison. Nous voulons repartir.

Isla Mujeres est en face, à une centaine de milles, la même distance qu’entre Key West et La Havane. Demain, ce sera el Año Nuevo. Demain, après deux mois de galop échevelé, nous ancrerons dans une baie tranquille, nous boirons une cerveza avec une tranche de citron vert, nous mangerons des tacos avec de la salsa et surtout, nous nous moquerons de la météo.

Nous partons à 10 h sous un ciel bleu immense et un vent sud-est un peu plus assagi.
« Vieux routiers du Gulf Stream », rassurés par un bulletin météo sans gros temps, nous atteignons ces rares moments de grâce où l’on se sent vent et eau, baignés dans l’instant présent, légers à respirer l’univers. La nuit est sereine, plus humaine. Nous rencontrons quelques cargos en provenance des états américains du Golfe du Mexique. Parfois, un Las Vegas flottant surgit de nulle part et éclabousse la nuit d’une orgie de néons. À bord, la croisière s’amuse. Ce doit être soirée confetti-champagne-cotillons. La Saint-Sylvestre est plutôt tranquille à bord de Zen qui arbore ses feux de route pour toute illumination. Au coucher du soleil, nous avons écouté « It’s a wonderful world » de Louis Amstrong, notre chanson culte en bateau. Nous avons croqué deux carreaux de Toblerone. À minuit, de la radio muette depuis le matin, une voix jaillit, impersonnelle : « Happy New Year to All Stations ». Nous sortons de notre torpeur. Bisous et câlins sous les étoiles. Puis une soudaine bouffée d’émotion. Nous sommes ici seuls au monde, loin de nos enfants. Étienne est à Vancouver. Zoé est déjà au Mexique.

Le vent mollit et s’éteint à l’aube. La houle de l’arrière secoue comme un prunier un Zen maintenant propulsé au moteur. Les hôtels de Cancun se dessinent à l’horizon. Sur les derniers milles, le Gulf Stream a fait dévier de son cap le barreur endormi. Nous devons ramer à contre-courant pour regagner la baie de Isla Mujeres.

Nous n’arriverons jamais. Nous arrivons enfin. Par une après-midi paisible de lendemain de la veille, Zen dépose son ancre dans la baie, bandera mexicana à son tribord.

Le Gulf Stream à Isla Mujeres, Mexique, le 19 mars 2007


Nous attendons notre fenêtre météo pour rejoindre Key West. Nous attendons depuis une semaine. Nous devrons attendre une autre semaine. Zen est prêt. L’équipage est prêt. Il ne manque qu’un coup de tampon pour quitter le territoire mexicain. Key West est à 350 milles nautiques : trois jours et deux nuits. Key West est loin d’être chez nous, mais l’est déjà un peu plus.

Nous attendons notre vent du sud-est. En cette période de l’année, le vent ne souffle du sud-est que si un front froid descend du Texas et pénètre dans le golfe du Mexique. Le front froid aspire alors l’air tropical du sud et perturbe le régime normal des alizés est/nord-est. Le vent passe ensuite au sud-est, puis au sud pendant quelques jours. Pour faire une traversée confortable, il faut que le front froid flâne sur la côte du Texas et nous laisse trois jours de traversée. S’il est plus fort et plus rapide que prévu, il nous cueillera au milieu du Détroit de Floride avec ses orages à l’avant et ses vents forts du nord à l’arrière.

Chaque matin, nous étudions les cartes météo téléchargées du site de NOAA, le service météo américain. Nous échangeons par radio avec notre voisin Tom à bord de Maska Yukey, un ketch aux allures de bateau pirate qui écume les Caraïbes depuis sept ans. Nous « Skypons » avec Bernard Tonton Routeur, le frère de Monique, à Montréal. Nous faisons des plans de navigation, des estimations de durée, des stratégies de repli. Chaque matin, nous scrutons le ciel et le large avec la même pointe d’excitation qu’avant Noël de l’autre côté.

Le Gulf Stream est de nouveau devant nous. Presque une vieille connaissance. Cette fois, il sera notre ami. Il va vers le nord-est, nous aussi. Nous allons nous glisser sur son courant et gagner deux, trois nœuds ou plus.

Le Gulf Stream sera notre ami quand le vent sera notre ami.



La Isla de los Cascos

Il y a des trous dans la loi mexicaine.

« Le port du casque en vespa, mobylette ou motocyclette est obligatoire.»

Oui mais.

Aucun article ne prescrit le type de casque.


Aucun article ne prescrit le nombre de passagers.

Dommage que je ne puisse copier les photos qui y étaient annexées - je vous laisse donc le soin de "deviner"

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