Message reçu :
Dernier jour à Colon. Tito vient nous chercher et nous dépose en ville pour réceptionner notre équipage. A midi pile, nous retrouvons Alain et Meg. Gordon s'est désisté. Ce sera Yusin, un local, dépêché par Tito, qui le remplacera.
14h- départ de tout l'équipage avec Tito pour rejoindre le port et Papadjo.
Il manque un Zarpe pour le bateau dont le visa expire juste le 16 Octobre.
15h - Tito, ton zarpe
Si, Evelyn, je l'ai ton zarpe, je te l'envoie par le passeur.
15H3o - le zarpe est là. Nous appareillons pour les Flats. Fini le ponton de l'ancienne marina où nous sommes restés trois jours emmurés dans les containers.
17h - Ici, Papadjo, attendons le Pilote.
- Pas de problème. Il arrive.
17h30Nous balayons de nos yeux l'immense baie à la recherche du remorqueur qui va nous amener le pilote; Enfin, en voici un qui se dirige vers nous et nous largue notre Pilote. A peine a-t'il posé le pied à bord que le moteur ronronne et que l'ancre remonte. Il faut impressionner dés le départ. Nous ne ferons pas les huit noeuds réglementaires mais au moins on ne lambinera pas.
Milton, il s'appelle, notre pilote et il est plutôt sympa. En avant toute pour les premières écluses du lac Gatun. Nous y serons certainement à la nuit.
- Vous passerez derrière un cargo. Qui manoeuvre dans les écluses ?
- moi, senor.
- Est-ce que votre équipage sait ce qu'il y a à faire ?
- pas de problème.
En effet, Alain a déjà passé le canal trois fois; Yussin est dépeche par Tito bien souvent sur les voiliers qui transitent et Meg navigue sur les bateaux depuis le Mexique en tant qu'équipière. Donc, tout doit bien se passer.
Première écluse. Ca bouchonne. Une des chambres est en réfection. Du coup, les cargos côté Atlantique doivent attendre la sortie d'un cargo qui vient du côté Pacifique.
Nous prenons place à la suite d'un espèce de "Christmas tree", cad un de ces gros yatchs de milliardaire éclairé de mille lampions avec des grosses boules pour les radum et un tas de gadgets, du luxe tapageur, comme d'habitude.
La nuit s'installe, belle, douce, éclairée d'étoiles et de lune.
Nous progressons à la lenteur des escargots.
- Vous passerez à la suite d'un cargo qui va venir.
Ok ! le Christmas tree s'installe tout seul dans la premiere écluse. Notre cargo se pointe. On lui fait place. Enfin notre tour. En avant. Veiller à rester au milieu de la chambre, surtout. Les hommes du canal lancent les toulines sur le Papadjo. Chaque équipier amarre sa touline et dévide les bouts. Tout doit aller très vite. Les hommes du canal amarrent les boucles des bouts aux bittes d'amarrage. A border les bouts !
Papadjo est maintenant bien ficelé. On entend de suite le bouillonnement de l'eau qui pénètre dans le sas; le niveau va s'élever de 8mètres. A donner du mou et à border les bouts !
Sonnerie de réfectoire ! les portes de l'écluse comme une gueule géante se ferment derrière nous. Les portes avant s'ouvrent. Attention, départ.
Sifflement de chef de gare ! les locomotives qui tractent le cargo prennent leur départ.
Evelyn, surtout le centre du sas, surtout ! On avance vitesse réduite. les hommes du canal nous rebouclent dans la deuzième écluse. Stopper le moteur ! A border les bouts ! reficelé le papadjo ! dernière écluse. Oh ! c'est que nous aurons besoin d'un retapant, tout à l'heure. Enfin, c'est fait! Le pilote nous conduit dans le lac Gatun jusqu'aux bouées d'amarrage où nous passerons la nuit.
On se fait des cuba libre et des patates pour accompagner le super thon pêché sur le bateau le printemps dernier et gardé pour l'occasion. Zut ! quand Herve installe le super deux feux achete a Colon, il manque un brûleur ! Ah ! c'est qu'il râle !
-j'en ai marre ! c'est toujours comme ça ! on nous vole !;.....
Il faut le raisonner, le calmer. Mais c'est pas facile. Après l'histoire du brûleur deviendra une bonne plaisanterie, en catimini, entre les équipiers et Evelyn.
Deux dans les hamacs accrochés dans le cockpit, une dans la cabine de Natacha, notre fille. S'il pleut, les hommes reviendront à l'intérieur.
5H15 du matin. Il n'a pas plu. La nuit a été des plus douces. Les hommes dorment encore dans les hamacs comme des bienheureux. Evelyn prepare le café car le pilote doit venir à 6h. Petit déj de l'équipage. On a juste le temps de ranger. Notre nouveau pilote arrive. Equipage, prêt à partir et à le réceptionner. Moteur en marche ! Ah! ciel ! il est bien gros celui-là, une belle publicité pour Michelin, bien serré dans son jean avec sa chemise à carreaux qui fait des plis sur son gros ventre. Il a bien du mal à sauter du remorqueur sur le Papadjo.
José, il s'appelle. Bien équipé, le monsieur. Il a un gps en main et peut contrôler notre vitesse.
Il va la jouer serieux celui-là, attention !
On déhale de suite le bateau de la bouée. Le senor José veut sont café au lait avec du sucre. Bien ! c'est Meg qui reprend la barre et Evelyn sert le pilote sur un petit plateau, avec brioche et serviette, svp.
-Qui manoeuvre dans les écluses ?
- la senora Evelyn.
- Ok ! on parle anglais.
- non ! on parle espagnol. Nous sommes ici à Panama. On parle espagnol.
- Bien ! vous avez dit à l'inspecteur que le bateau faisait du 8nds. Pouvez-vous le faire aller à 8nds maintenant.
Ah ! l'enfoiré, le jésuite !
- Mais Senor José, l'inspecteur a noté huit nds. Ca c'est sur. Mais il m'a demandé à quelle vitesse réelle allait le bateau car c'est connu qu'il y a très peu de voilier qui peuvent faire les 8nds. Je lui ai dit que notre bateau faisait du 5,5. Il m'a dit qu'il le dirait aux pilotes.
José ravale sa salive.
-Nous devons arriver à 11h1O à l'écluse de Pedro Miguel.
Si on calcule bien, nous ne pourrons avaler les 23 milles à temps. Il nous manquera une petite demie-heure.
Meg est à la barre et ne la lachera pas avant l'écluse. José s'adoucit devant cette jeune fille bien sympatique avec laquelle il peut converser en anglais à loisir.
- nous passerons l'écluse à 12h45 a l'avant d'un cargo.
Tiens, tiens, il avait donc un deuzième plan.
- Ok ! Senor.
11H30 : Ecluse de Pedro Miguel. Attente du cargo. Il est temps de faire manger tout son monde avant le passage de l'écluse.
On va d'abord nourrir notre gros bébé, comme ça il avalera le réglement avec les sandwichs. Evelyn, bourre, bourre ! couche épaisse de mayonnaise, fromage, jambon, crudités. Il ne faut pas qu'il s'étouffe mais il faut qu'il se rassasit, le bibendum ! Il avale tout ca avec du coca. Ah ! ca marche ! il s'adoucit d'autant plus que notre Meg a du charme et il se détend de plus en plus. Il doit lorgner sur le petit pied tatoué de notre équipière. Le tatouage représente les deux îles de la Nouvelle Zélande.
C'est si mignon.
La partie sandwich se termine. Notre cargo se pointe. Il fait 75O pieds. Un veritable monstre. Heureusement que nous prendrons l'avant. Evelyn prend la barre. Nous rentrons dans l'écluse de Pedro Miguel. Il faut s'amarrer à babord sur un quai à fleur d'eau. Ciel ! c'est dangereux, ca pour le bateau. On l'a vu de suite avec Hervé. Mais Bibendum n'a pas démordu. C'est là et pas à tribord où le quai est bien plus haut. Hervé est furieux.
- Qu'est-ce-que c'est que ce connard ? Il n'y connait rien à la navigation.
- Hervé, si tu ne te calmes pas, moi, j'arrête tout.
Comme si, on pouvait s'arrêter dans le canal.
Evelyn fait l'approche. Les hommes du canal se saisissent des bouts et amarrent aux bittes.
- Tu l'as évité au quart de poil ! Mais, on devrait dire non à cet enfoiré ! c'est pas son bateau ! il s'en fout lui !
- Hervé, calme-toi ! nom de Dieu, calme-toi!
Un lourd nuage couleur d'encre menace sur babord alors que le "Patricia", notre cargo, amorce son entrée. Sifflement des locomotives qui les unes après les autres, de babord et de tribord, glissent sur les rails et vont récupérer les cables pour tracter le monstre. Car c'est un monstre avec ses deux ancres comme deux immenses serres, juste derriere nous; Le nuage progresse et juste au moment où on doit larguer pour avancer dans l'écluse, il déverse. C'est une pluie folle, froide et lourde qui s'abat sur nous. On n'y voit plus rien. Ca dégouline de partout. Le vent monte en puissance, le tonnerre éclate et Hervé craint pour ses appareils et commence à débrancher les antennes. Evelyn n'est pas du tout chaude pour larguer les amarres.
- Senor, on ne peut pas y aller. On n'y voit rien.
D'ailleurs, tout est arrête côté gros monstre. Le canal annonce à notre pilote qu'on attendra la fin de la bourrasque. Bibendum est archi-trempé. Yussin grelotte et je lui dis de rentrer ainsi qu'à Meg. Tout le monde s'essuie tant bien que mal avec les serviettes de toilette. Ca dure, ca dure. Enfin, le ciel se radoucit. L'avantage, c'est qu'il n'y a plus de vent maintenant et que le déhalage du bateau va se faire sans problème. On avance alors jusqu'au fond de l'écluse et Patricia prend position derriere, bien proche. Impressionnant.
Maintenant, c'est l'inverse. Le sas va se vider de son eau et nous allons descendre, descendre. Aux équipiers de laisser filer les bouts et de les raidir au besoin. Tout se passe bien. Nous quittons Pedro Miguel et en avant pour les dernières écluses, celle de MiraFlores avec notre grosse Patricia Shulte derrière. L'armateur, qui a donné le nom de sa fille à ce cargo, n'a pas imaginé combien c'était peu flatteur pour elle : grosse carcasse, dentition effrayante. Ah ! elle n'est pas fine, la Patricia. Et elle fait peur ! d'ici qu'elle se rapproche un peu de nous ! Brrrrr!
Miraflores en vue, si proche de Pedro Miguel, après le passage du Pont du centenaire. Attente ! mais c'est vicieux, ce canal. On nous demande du 8nds et on est toujours en état d'attente devant les écluses. En plus, la Patricia prend de la place et il faut parer dans les circonvolutions que nous faisons en attendant.
- Attention ! c'est à nous. Action !
Et d'une ! et de deux ! et la troisième !
Les hommes du canal viennent d'amarrer les bouts de la pope, ceux de Meg et de Yussin; Evelyn attend le moment où ils vont amarrer ceux de la proue, ceux d'Hervé et d' Alain, pour donner une marche arrière au bateau et le stopper. Aiê ! Claquement sec ! bateau stoppé net ! chomards ouverts à l'arrière.
Meg et Yussin n'ont pas attendu la marche arrière et ont bordé leurs bouts. Bibendum, qu'est-ce que tu faisais donc ? Je ne peux tout de même pas faire tout ton boulot et me retourner pour voir les équipiers alors que je dois me concentrer à la barre !
Les portes s'ouvrent enfin,gueules géantes sur le Pacifique. On y va tout droit.
Bibendum a droit de suite à son remorqueur. Il aurait dû le refuser, bien trop gros pour le Papadjo. Mais non ! Herve lui explique de mettre un pied sur le roof, un pied sur le chandelier et ensuite hop sur le remorqueur, presqu'à niveau. Mais Bibendum a peur. Il essaie un peu à sa façon au niveau des passavents, 1 mètre au-dessous du remorqueur; puis il retente par l'arrière du Papadjo. La proue noire du remorqueur s'avance. Evelyn se concentre à la barre pour maintenir la meme direction. Bibendum, un pied sur le remorqueur, un pied sur le Papadjo, n'arrive pas à se décider de lacher le hauban du bateau . Il ne peut maintenir l'écartellement et soudain s'affaisse le long de la coque du Papadjo.
Ah! mais c'est pas vrai ca ! Au point mort, j'hésite à stopper le bateau en marche arrière, car l'hélice pourrait broyer les jambes de notre pilote. Mais il me crie :
Arretez les machines ! arrêtez !
Gros coup de marche arrière. Bateau stoppé. Yussin et Alain essaient de hisser Bibendum. Mais il est trop lourd. Le remorqueur cherche sa bouée de sauvetage.
- Into the water ! voilà t'il pas que je lui parle en anglais !
Gros floc ! Bibendum est dans l'eau. La bouée rouge est à sa portée. Il l'enfile. Dans l'aventure, il nous a largué une grosse défense. En route pour la défense qui vogue dans le courant. Le remorqueur fait glisser une échelle et notre pilote se hisse péniblement jusqu'à bord. En voilà t'il pas une aventure.
Hervé, super méchant !
-Ca lui fait du bien, à ce gros lard !
Meg a pris la photo de Bibendum dans son bain du Pacifique. Super, pour les archives. Ah! ce qu'on est méchant tout de même.
C'est la joie à bord, maintenant. On se l'ai fait ce canal et à part l'incident des chomards, on peut se réjouir, de l'ambiance, de la compétence de nos équipiers.
Meg et Yussin nous quittent de suite. Alain reste avec nous jusqu'à demain et nous fera, non des pataques mais des patacons, specialité panaméenne à base de bananes plantains.
Ca y est, Papadjo baigne dans le Pacifique.
Le lendemain, Evelyn telephone à Tito pour voir s'il ne pourrait pas récupérer le brûleur de la gazinière.
- Oh ! Evelyn ! ca va mal.
- Qu'est-ce-qui se passe Tito ?
- Il y a eu une fusillade à Colon. Mon fils, deux équipiers d'un bateau, le mécanicien ont tous été blessés, l'un aux bras, l'autre à la jambe. Mon fils est à l'hopital à Panama city.
Papa-Djo...........
Aucun commentaire:
Publier un commentaire