dimanche 9 mai 2010
ÉTOILE DE LUNE - Nat et Dom à la Baie des Vierges
Objet : Premières impressions sur un décor unique au monde
Photo : Le preux chevalier des Vierges (plus tard vous aurez une vue générale... mais patience!)
Erratum : en fin de message
Kaoha,
Dans le courrier 184, qui vous racontait la naissance d'une constellation d'îles et les étapes de vie de ces dernières, les Marquises faisaient figure de jeunettes. En effet, elles s'épanouirent il y a 1,3 million d'années. En longeant la côte de Fatu Hiva, les falaises donnent corps à cette adolescence géologique.
Sur la côte au vent, peu arrosée, seul un velours de végétation rase parvient à s'accrocher aux parois rocheuses. Le relief est brutal, chiffonné, c'est une succession de "wwwww". Des falaises colossales, ombrageuses plongent à pic dans l'écume bouillonnante de l'océan. Décor tortueux, où sans relâche, s'affrontent la terre et la mer. Aucune courbe douce ne s'échappe de ce cordon de saillies anguleuses interrompu de gorges profondes aussi affûtées que si elles avaient été taillées par la hache d'un goliath.
Trop jeune, Fatu Hiva n'a pas eu le temps de façonner des baies rondes et accueillantes. Elle reste sauvage, rebelle à l'implantation des hommes. L'être qui l'aborde aura, lui-même, une âme farouche et solitaire, pour y survivre.
Sous le vent de l'île, des arêtes végétales monumentales descendent du ciel vers l'eau indigo. L'océan se calme, dominé par l'extraordinaire masse volcanique qui l'assujettit. Les arbres et les cocotiers ont colonisé d'impensables parois verticales.
Comment la végétation s'y prend-elle pour régner sur des terres aussi hostiles?
A l'approche du seul mouillage possible de l'île, la baie d'Hanavave, le spectacle nous laisse pantois. L'anse a été surnommée baie des Vierges par les missionnaires, et baie des verges par les navigateurs. Sincèrement..., je ne sais pas ce que les uns et les autres avaient en tête, mais les rochers qui les ont inspirés ne ressemblent ni à des jeunes femmes, et ne symbolisent pas davantage des éperons phalliques. A vrai dire, nous ne les avions pas vu, au premier regard, car nous étions subjugués par la toile de fond de ce théâtre unique où la montagne majestueuse tutoie les Dieux.
Au creux de ce chapelet d'encorbellements, quatre protubérances, presque anecdotiques, s'échappent d'une corniche. Je n'y vois rien d'autre que quatre personnages. Trois têtes de tikis tournant le dos à l'océan et fixant, les yeux grands ouverts la montagne. Au coeur de cet alignement, se dessinent les traits d'un preux chevalier : Richard Coeur de Lion en personne!
Ha si, je vous l'assure, nul autre que ce vaillant homme ne pouvait s'immortaliser dans un tel endroit!
Il en a tous les attributs : la couronne, le visage au front haut, au nez aquilin et à la barbichoune carrée! Si,si... rien n'y manque, pas même l'armure et le bouclier. Je concède que la marque de son blason a été élimée par les pluies. Mais il a fière allure, mon chevalier!
Voici donc qu'en toute humilité, pour moi, Hanavave n'est plus guère la baie de Vierges terrassant d'audacieuses verges, mais bien celle de Richard Coeur de Lion veillant sur nos mâts!
Divagation de moussaillon, pensez-vous?
Hé bien non!
Le capitaine, qui est la raison, le garant des neurones cartésiens du bord, en rajoute! Si Richard Coeur de Lion ne l'émeut pas, les trois tikis qui l'entourent lui suggèrent de nouvelles théories sur les insondables sculptures mégalithiques que sont les Moaïs de l'île de Pâques. Vous vous souvenez de ces monolithes géants qui n'ont toujours pas livré leur secret? Hé bien, Dom est persuadé que les sculpteurs de ces statues sont passés, ici, dans la baie d'Hanavave. Subjugués par l'adresse de la nature à façonner des êtres de pierre, ils ont voulu reproduire ce qu'ils ont vu. Pourquoi à l'île de Pâques? Hé bien! Les ancêtres des Polynésiens, les Maohis essaimèrent leur population de la Chine à l'île de Pâques et passèrent par les Marquises. Forcément! C'est sur le trajet... et puis c'étaient des navigateurs d'élite! Bref, nos Maohis, débarquant à l'île de Pâques, n'ont eu de cesse que de se fabriquer un album de souvenirs de leur escale à Fatu Hiva.
Ne riez pas... Voyons, voyons un peu de sérieux!
On ne sait jamais que Dom soit à l'aube d'une découverte historique?
En tout état de cause, cette comparaison, vous amène tout droit, ici! Au pied de ces géants rocheux aux expressions de l'au-delà. Vous y êtes, vous aussi, en plein coeur du Pacifique, au creux de cette baie impensable à l'aune de l'imagination humaine. Au coeur d'un monde aussi gros qu'une tête d'épingle sur un planisphère et qui pourtant, lorsqu'on y jette l'ancre, réveille la conscience d'une chance inestimable, celle d'assister à un spectacle grandiose et de contempler un décor unique au monde.
Plein de bonnes choses à vous, et profitez de la vie...
Nat et Dom
www.etoiledelune.net
PS : Je vous dois toutes mes excuses, hier je vous ai fait une phrase toute "croche" lorsque je vous ai parlé du cochon de Désirée. A croire que j'ai déjà trop fréquenté notre voision japonais! J'avais les idées "toutes mêlées et ça donnait ceci: "Dans le fond, un cochon, tout juste de visé d'un coup bien placé dans sur les parois de la montagne à côté de nous."
Traduction : Francis et Jacques sont partis avec leur fusil sur la falaise à côté de nous. De leur balade, ils ont ramené, le cochon, qui gisait au fond de la barque quand ils nous ont abordé. Il y a fort à parier, qu'il se trouvera dans notre assiette ce midi...
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