Nouvelles des Navigateurs

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entre les navigateurs, familles et amis du Réseau du Capitaine et de la CONAM.

dimanche 14 juin 2009

Nathalie et Dominique au Québec - RÉCIT














L'équipage de L'Etoile de Lune au Québec 3

Le 11 juin 2009

Le temps se gâte, mais la bonne humeur reste au rendez-vous.

Bonjour,

Depuis que nous avons quitté les baleines de Tadoussac, le soleil nous boude. Pluie, froid et brouillard nous tiennent compagnie. A Matane, nous logeons entre la marina et le fleuve. Au bout du quai, nous trouvons le Knorr de Matane. Il est la reconstitution du drakkar d'Oseberg. Il fut construit en 1983-84, pour les festivités du 450e anniversaire de la venue de Jacques Cartier. Ce drakkar était un clin d'oeil fait aux premiers vrais découvreurs du Québec, les Vikings. Le bateau construit par Jean Marie Verreault de Les Méchins mesure 37 pieds de long et 10 pieds de large. Les Vikings bravaient les mers les plus dures au monde. Ils laissent des souvenirs en Angleterre dès 793 après J-C. Puis ils traversent l'Océan et se retrouvent en Islande et au Groenland entre l'an 900 et l'an 1000. On peut penser qu'ils venaient prendre le frais dans le golfe du Saint-Laurent dès ces années-là... Sur le parvis de l'hôtel, autre époque, autre origine, un crevettier ancien est posé sur la pelouse. Deux ouvriers le transforment en boutique de souvenirs. Il est en bois, il a fait son temps sur l'eau, à présent il représente fièrement la pêche à la crevette spécialité de Matane.

Après ces découvertes matinales, André et Louise nous conduisent aux échelles à saumons. Le bas du fleuve compte 125 rivières à saumons. Un vieux monsieur nous tourne autour. Visiblement, il ne sait pas comment entrer en contact avec nous. Il nous voit tournicoter, il écoute André qui m'explique le passage des saumons... Et... il ne résiste pas à l'envie de nous aborder. Bien lui en a pris. Sous cette grisaille, l'importance de la chose ne m'avait pas sauté aux yeux. Mais sous le regard et les explications de Jules, tout un monde s'ouvre à moi. Le monde des saumons qui passent les rivières de bout en bout malgré les barrages fabriqués par les hommes.

Jules est en charge du centre de la rivière à saumon de Matane. Aidé de jeunes étudiants, il compte jour après jour, du 14 juin au 30 septembre, les saumons qui passent par Matane. Ils remontent la rivière sur plus de 85 kilomètres. Un saumon vit une douzaine d'années environ. Les saumons d'Atlantique ne meurent pas après la reproduction, comme le font les saumons du Pacifique. L'an dernier 2042 saumons sont passés par Matane, 1056 d'entre eux ont été capturés dont 96 dans la fosse 1 et 2. Les saumons qui ne peuvent emprunter le lit de la rivière bouchée par le barrage s'orientent dans une bifurcation nantie de séparateurs. Jules est en charge d'ouvrir et de fermer les portes des séparateurs jusqu'à la libération dans la rivière en amont du barrage. Il se place derrière une grande vitre et compte les saumons. Le comptage fini, il libère le saumon en actionnant les portes. Le mâle se reconnaît par son crochet placé sous le bec. Tandis que les femelles sont grossies par les 10 000 à 15 000 oeufs qu'elles portent. Les parents reproducteurs remontent la rivière dès le mois de juin et redescendent "en famille" vers la fin octobre.

Jules nous apprend que la pêche est très règlementée. A Matane, ils viennent d'installer les échelles qui descendent du pont vers la rivière. Les pêcheurs passent des journées entières jusqu'à mi-corps dans l'eau qui peut atteindre 20 degrés à la fin août. La température de la rivière est plus élevée que celle du fleuve. Pour passer ses journées à titiller le poisson de leur mouche, les pêcheurs payent un droit qui peut atteindre 1000 dollars. Un maximum de 7 poissons par saison peut être pêché par permis octroyé. A chaque prise, les pêcheurs ramènent le poisson à Jules qui le pèse. Il mentionne qu'un pêcheur "correct" remettra une femelle pleine à l'eau! Les Européens et les Américains aiment venir en été pour s'adonner à la pêche au saumon qui demande stratégie, finesse et endurance. Il nous explique enfin que les Indiens ne pratiquent pas la pêche à la mouche. Ils ne s'embarrassent pas beaucoup, ils jettent des filets ce qui est plus simple, mais beaucoup plus destructeur. Ainsi, le gouvernement offre des primes pour que les Indiens laissent le poisson tranquille. Sur les rives de la rivière Cascapédia, les Indiens Chics Chocs ont ainsi reçu le montant de 1 million de dollars pour ne plus pêcher pendant les quatre années à venir.

Jules est adorable, il ne compte pas son temps et il est visiblement heureux de notre intérêt pour ce qu'il nous transmet. Alors que nous nous étions salués et pensions partir, il nous rattrape par le col et nous emmène au pied du pont. Il y a là un castor. L'emblème du Canada. Il est couché sur sa queue, sur un lit de feuilles de pissenlit. Voilà que le maître du barrage se trouve éberlué devant l'oeuvre de son concurrent à deux pattes! Il est bloqué lui aussi dans sa progression. Il sera capturé et emmené hors de la ville, dans la montagne où il pourra s'adonner à son instinct constructeur. Saviez-vous qu'une famille de castor qui comprend quatre individus consomme annuellement 778 arbres ?

Plus tard, nous aurons la chance de voir les oeuvres du castor. Il construit une hutte en forme de dôme à l'aide de boue et de troncs de jeunes arbres (bouleaux blancs, aulnes, saules, érables à épis, peupliers baumiers et faux-trempes). Au sommet, il pratique une ouverture pour l'aération (cela ne vous fait penser à rien?) La pièce centrale fait 1,5m de diamètre, pour un mètre de hauteur. La porte est sous l'eau. A proximité de la hutte, et souvent au sein même du barrage, il se constitue un baluchon avec sa réserve de nourriture (branches, écorces et ramilles). Il pense à tout ce castor.

A Sainte-Anne des Monts visite intérieure. Ben oui! Fait frette ! Fait humide... Nous découvrons grâce aux explications patientes d'un jeune étudiant la vie du fleuve. Quelle faune! Quelle variété! Il attire notre attention sur la pollution. Nous avons beaucoup à apprendre, en effet! Le béluga est en voie de disparation à cause de celle-ci. Il est en fin de chaîne alimentaire. Le premier est le krill, mangé par la morue, elle-même mangée par l'anguille qui elle est mangée par le béluga. Entre le krill et le béluga, la pollution chimique passe d'un facteur 1 à 2400. En fin de vie un béluga sera 2400 fois plus affecté par la pollution que le krill, car il subi à la fois la bio accumulation et la bio concentration. Tout cela donne à réfléchir. Surtout expliqué comme il le fait. Il nous remet un témoin pas plus gros que le petit doigt représentant le taux de pollution du krill, tandis que le taux d'infection du béluga ressemble à un sac de 50 litres de poubelle. Que faire? Sinon s'alarmer. Que dire? Sinon avoir envie de crier très fort, plus fort et tous ensemble pour que les industries en amont du fleuve arrêtent de polluer le Saint-Laurent. Des industries pour la plupart américaines, qui ne semblent pas encore avoir compris l'impact de leur inconscience????

Outre ce cours écologique, nous pouvons admirer les homards qui affichent plus de 30 et 40 ans au compteur. Ceux-là ont des pattes grosses comme les avant-bras du capitaine Poppey! Saviez-vous que le homard peut vivre jusqu'à 100 ans ? Au passage, le homard est carnivore et à son heure nécrophage. Nous décodons aussi les amours singulières du crabe des neiges. Saviez-vous que les femelles sont si rares que lorsqu'un mâle en trouve une, il se l'accroche sur le dos. Il la coince avec Dieu sait quoi, et il se déplace avec elle jusqu'à tant qu'elle soit fertile. Mais, ce beau ténébreux à pattes velues a l'instinct du territoire. Et donc, lorsqu'il croise un autre mâle, il n'hésite pas à utiliser sa femelle comme planche à clous pour taper et taper encore plus fort sur son adversaire. Je vous le dis, un gars aussi galant et prévenant, il n'y en a pas d'autres ! Heureusement !

Nous bravons le mauvais temps et nous nous rendons à la réserve faunique de Matane. Qu'espérons-nous voir? Des orignaux. Malgré le temps, la forêt est splendide. La rivière Matane se tortillonne au gré du relief qui la surplombe. Les monts se succèdent et déclinent les verts. Vert profond des conifères persistants, verts pâles presque blancs des saules pleureurs, verts jade, vert anis et au coeur de cette palette printanière les teintes rosées d'arbres qui se distinguent sans me révéler leur nom. Vraiment, tout le monde parle des teintes d'automne des forêts du Québec... Mais celles du printemps valent largement le détour. Elles se défendent si bien, qu'elles n'ont nul besoin du soleil pour se montrer resplendissantes.

Au détour de la route, des ponts couverts. Anciens ponts très caractéristiques de la région. Un charme, une allure... un rêve de pont. Il n'en reste que quelques-uns. Pourvu que les habitants en prennent soin. Ce serait bête de perdre de tels édifices. Et puis dans le parc faunique, nous croisons le regard d'un jeune orignal. Il prend son temps pour traverser la route. Il s'arrête à notre hauteur dans les fourrés et nous hume tranquillement. Plus loin, nous atteignons le lac Matane. La brume lui donne un charme particulier. Les conifères dessinent des ombres fantômatiques sur l'eau antracite. Des maisons perdues au milieu d'une nature gigantesque attendent l'été.

Le temps ne s'arrange pas, le charme tant décrié de l'anse pleureuse nous échappe complètement dans la grisaille qui s'épaissit. Néanmoins, André nous explique pourquoi, l'anse porte le nom de pleureuse. Lorsque le vent souffle de l'est, il passe dans les vallées et arrache des cris de pleurs à la roche.

Sur la route nous trouvons "L'étoile du Nord". Comment ne pas s'y arrêter ? Danielle, une ancienne de Montréal nous installe devant les baies vitrées face au fleuve. Ce qui nous prenions pour l'île d'Anticosti n'était qu'un mirage, des bancs de brouillards qui se dirigent vers nous. Avant que la mer disparaisse, en nous réconfortant d'un bon chocolat chaud, un petit rorqual à bosse fait ses pirouettes. Et voilà un saut, puis deux, puis trois... puis encore... Nous ne les comptons plus. Seul le rorqual s'amuse dans l'eau froide, nous le regardons, de loin, mais le coeur ravi des ses facéties.

Le rideau tombe, nous arrivons au cap des Rosiers. Le patron du motel, Alain Côté, est un passionné de sa région. Il nous ouvre les yeux sur ce que nous ne voyons pas. Le phare le plus haut du canada est sur la pointe, la mer devant et il est aux portes du parc Forillon dont les falaises se cachent sous un épais manteau de brume.

Nous lui demandons de croiser les doigts, pour qu'il fasse beau demain...

A suivre
Des pensées avec notre soleil du coeur, Nat et Dom de l'étoile de lune Amitiés marines Nat et Dom de L'étoile de Lune http://www.etoiledelune.net

Pour nous suivre d'escale en escale trouvez sous le lien suivant la dernière position du bateau ainsi qu'un petit commentaire :
http://www.winlink.org/dotnet/maps/PositionReportsDetail.aspx?callsign=f4fjd

Nous donnons régulièrement de nos nouvelles sur le "Blog de Nycole" que vous trouverez au lien suivant :
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