jeudi 11 juin 2009
Nathalie et Dominique aux "baleines"
L'équipage de L'Etoile de Lune au Québec 3
Le 10 juin 2009
Des baleines en masse !
Bonjour,
Avant notre départ nous avions reçu un beau programme de voyage, concocté par Louise et André. Ce séjour sur papier était parfait, sur place il l'est encore plus! Tout est étudié, pour mettre le Québec dans un petit mois. Un tour de force! Le Québec fait 5 fois la France ! Ca voudrait dire que si proportionnellement un Québécois voulait visiter la France, il devrait prendre une petite semaine pour en faire le tour.
IMPOSSIBLE!
Ca demandait une sacrée organisation et une bonne volonté que nos amis ont mises à l'épreuve pour si bien programmer la chose. Et c'est un miracle auquel nous assistons chaque jour. Nous parvenons à voir l'essentiel et à passer d'une rive à l'autre du plus majestueux fleuve de la planète.
Chaque jour est si différent de la veille que l'illusion d'avoir plusieurs journées en une est là. Nous visitons des sites tous différents. Nous passons de la forêt profonde aux paysages maritimes et montagneux avec la légèreté de papillons. Nous rencontrons des gens exceptionnels prêts à chaque instant à nous renseigner ou à nous raconter un petit bout de leur Québec à leur façon...
Le programme est respecté à la lettre. Pourtant à aucun moment nous n’avons la sensation de le suivre. La liberté de découvrir est au rendez-vous. Dans le programme, il y avait écrit pour le mardi 9 JUIN : Expédition aux baleines bleues (30 m/130 tonnes), rorqual, et fjord du Saguenay (3 heures en Zodiac).
La veille nous arrivons à Tadoussac. Nous nous promenons sur le quai et le long de la petite marina au coucher du soleil. Le ciel est serein, l'air pur. Nous passons devant l'hôtel en bois peint de rouge et de blanc : l'incontournable hôtel de Tadoussac. On nous en parlait depuis la Caraïbe. Les chambres un peu chères : 250 dollars la nuit, sans rien d'autre que de dormir. Mais il n'applique aucun tarif sur les photos. Il se laisse prendre sous toutes ses coutures, sans sourciller, sans nous demander quoi que ce soit.
A ses côtés en contre bas, surveillant la marée du fleuve, la plus ancienne chapelle de bois de l'Amérique du Nord. Construite en 1880, son clocher est là, fidèle depuis tout ce temps. Sa peinture fraîche lui donne des airs de jeune première. Le village attend ses touristes, ils ne sont pas encore très présents.
Nous trouvons avec peine de quoi manger. Mais... au détour d'une rue, le Restaurant Le Bateau (ça s'imposait!) nous fait de l'oeil. Il offre un buffet avec les spécialités québécoises : bines au lard, tourtière du lac Saint Jean. Et la fameuse tarte au vinaigre. Dans la région il était difficile d'obtenir des citrons. Vous pensez... un village retiré, il était ravitaillé au lance-pierre et attendait le dégel pour être livré.
L'ancêtre de la maison aimait la tarte au citron, sa femme eut l'idée de changer le citron qui lui manquait par du vinaigre. Ce n’est pas mauvais ! Faut y goûter, c'est surprenant comme c'est bon! A la sortie du restaurant, repus de mets succulents faits maison, un accordéoniste bat la mesure d'une semelle déterminée sur le plancher de la terrasse en bois. Le soleil se couche, comme pour mieux saluer l'artiste, il décline ses plus belles teintes sur le clocher du célèbre hôtel de la ville.
Au lendemain matin, je me réveille avec des questions. Les baleines savent-elles qu'elles sont prévues au programme du jour ? Ont-elles reçu un bristol disant que nous les espérons ? Comment ça se passe ?
Le soleil est au rendez-vous. Un beau ciel bleu. Le Saint-Laurent reflète l'azur, la brise légère est à peine perceptible, un petit fond d'air frais nous titille le bout du nez. Nous arrivons au bureau des inscriptions aux croisières AML (lisez bien ces trois lettres... ça ne vous dit rien???). Les gentilles hôtesses nous conseillent de nous habiller chaudement. J'ai un damart, une petite laine, deux polaires, un coupe-vent et elles rajoutent par dessus, une salopette de navigateur et une surveste. Me voici prête à affronter la Lune. Je ne peux plus m'asseoir tant je suis engoncée dans mes vêtements.
Nous embarquons dans un gros Zodiac jaune (ça nous poursuit... on ne pourra jamais se départir de cette couleur!) et ... en avant à fond les manettes vers l'aventure. Notre guide, Nicolas a embarqué en plus de nous un groupe de Montréalais, une singapourienne, trois belges et une française. Nicolas nous dit qu'il ne suit pas les autres Zodiacs. Eux, ils partent dans le fjord du Saguenay. Il dit que LUI, il cherche LA baleine. LA GROSSE !
A plus de vingt noeuds de vitesse, il nous emmène au beau milieu du fleuve, à plus de 50 kilomètres de Tadoussac. En quelques sauts nous y arrivons. Quelques têtes de phoques sortent de l'eau. Elles semblent dire :
"Tu es qui toi? D'où tu viens toi?"
Les phoques sortent jusqu'à mi-corps, fantomatiques sur une eau plate. MAGIQUE ! A perte de vue, le fleuve est là, gentil sous nous. Sans ce calme inespéré, nous ne verrions pas ces gentilles bêtes curieuses monter et descendre en douceur à gauche, à droite, devant... Espiègles, elles ne se laissent pas approcher.
Plus loin la peau blanche et crue des bélugas. Apparition chimérique de groupes dispersés. La texture de leur peau me fascine. Loin de cette peau luisante des baleines ou des dauphins, elle est mate, de loin s'ils ne bougeaient pas tant, nous penserions qu'il y a encore en ce printemps des bloques de glaces à la dérive sur le fleuve.
Il est vrai que les bélugas sont les seuls mammifères marins qui vivent à l'année dans la région. Ils sont en voie de disparition. Les Zodiacs ne peuvent plus les approcher à moins de 400 mètres. Trop loin pour mon petit appareil photo tout terrain (car j'ai laissé sagement mon zoom canon dans le coffre d'André, bien au sec!)
Nicolas n'est pas satisfait. Il veut LA GROSSE baleine. Nous tournicotons au beau milieu du fleuve à la recherche d'un jet d'écume de 8 mètres de haut. Il tient bon. Nous sommes transis de froid. Il ne regarde pas ceux qui se réchauffent les mains en soufflant dessus. Le soleil est froid, l'eau est à 5 degrés, l'air est à moins que ça...
Dans la "gang" des Montréalais, ça s'agite. Un des gars se lève et commence à faire le pitre sur les boudins jaunes du Zodiac. Il nous sort un florilège de blagues. L'air de rien, tout en riant fort, nous nous réchauffons aux "niaiseries" des copains qui s'amusent à tourner en dérision Nicolas. Celui-ci tient bon, il est passionné. Les baleines sont dans le fleuve, dit-il. Elles sont plus nombreuses en août. Nous savons qu'il faut beaucoup de chance. Mais il y croit, il zigzague, d'une main assurée, il tourne et fait gîter son Zodiac pour remettre de l'ordre dans les troupes, ce qui nous fait rire de plus belle... et Pfppfffppffp!
Elle est là. Aussi incroyable que cela puisse paraître. Elle reste en surface, ondule et fait jaillir son souffle, son aileron dorsal épouse le clapot léger. Elle est là! Nicolas qui travaille depuis onze ans avec les baleines la reconnaît:
"C'est Perroquet, l'aileron est rongé, c'est bien lui! C'est un rorqual commun ! Il vient d'arriver. Car, la semaine dernière, nous 'avions observé qu'une grande baleine..."
Le rorqual commun vit jusqu'à 80 ans et revient chaque année dans le fleuve pour s'alimenter. Nous le suivons un moment. A croire qu'il pose. Les baleines ne peuvent être approchées à plus de 300 mètres. Nous respectons les distances. Perroquet finit par sonder... Ile disparaît nous laissant seuls. Nous cherchons sur l'horizon, plus rien... Il faut attendre 20 bonnes minutes entre chaque remontée.
Notre Montréalais reprend ses plaisanteries, et le temps passe dans une joie inimitable. Nous repassons vers les bélugas, mais en chemin, Perroquet a la bonté de revenir. Puis se présente un autre rorqual. Nicolas s'écrie :
"C'est Capitaine Crochet ! Elle vient depuis 1994. Il se demande si elle vient avec son bébé?"
Pas le temps de finir la question, Bébé, sort l'aileron tout à côté de sa mère. Ils sont si prêts que je loupe un superbe cliché. Il faut dire que je suis tellement en pâmoison devant ce balai que je profiiiiiiite tant et tant que j'oublie que mon appareil est sur zoom... ça fait un beau dos, bien proche de moi... Mais alors... si la photo est ratée, je vous le dis, moi dans ma tête j'ai incrusté le plus beau, le plus tendre spectacle que la nature m'ait offert jusqu'à ce jour.
J'en ai le frisson dans les bras et l'échine en vous l'écrivant. C'est un pur bonheur. La mémoire est le plus bel album photo que l'on puisse posséder. Et si je peux par ces quelques mots vous transmettre une once de mon émotion, ce sera gagné!
Nous passons deux heures trente avec les baleines, les bélugas et les phoques, puis les moteurs puissants du Zodiac nous ramènent vers la Rive-Nord du Saint-Laurent, nous pénétrons dans le fjord du Saguenay. Un bras de mer qui pénètre dans le continent entre des escarpes tapissées de végétation. De détour de falaises en épaulements, le Saguenay s'enfonce à perte de vue dans le continent. Une plaque de glace, dernière survivante de l'hiver s'accroche à l'escarpement de pierre.
Un petit rorqual joue avec le Zodiac, et Nicola nous mène jusqu'à une cascade vertigineuse. Avec le Zodiac, nous pouvons nous approcher si près que des éclats d'eau nous parviennent. La cascade n'était pas comprise dans le tour, Nicolas fait des extras, notre balade devait durer 3 heures... il joue les prolongations.
Nous sortons enchantés de ce tour. C'est vrai qu'il peut paraître "touristique". En bateau nous voyons régulièrement des dauphins et des baleines le long du bord. Mais je vous assure que ce tour n'a rien de surfait. Il est tout bonnement mirifique. Nous avons eu de la chance, le temps était de la partie, le guide était passionné, et sincèrement je n'ai jamais, en trois grosses heures, vécu à la fois le rire, l'émotion, la découverte et la rencontre avec tant d'animaux marins.
C'est tout bonnement inoubliable et féérique !
L'après-midi nous passons sur l'autre rive, vers Rimouski et Matane. Le temps a changé du tout au tout. La mer s'est levée près de 4 mètres de creux, le vent est de Nord-Est contre la marée et le courant et souffle à plus de 25 noeuds.
Vraiment ce matin, nous avons eu de la CHANCE et de la plus rare des espèces !
A nous suivre sur l'autre rive.
Toute notre amitié marine et terrienne
Nat et Dom de l'étoile de lune
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