En route pour la Nouvelle-Zélande
01 nov 09
Tonga, Pacifique sud
Nous venons de lever l'ancre ce matin, 01 nov à 08h00 AM. Voilà, le saut est fait, nous avons enfin entrepris cette fameuse traversée crainte de tous. C'est que tout le monde ne parle que de ça depuis des semaines et des mois et tous attendent fébrilement la fenêtre météo idéale en priant que le temps soit clément. On s'est inscrit gratuitement à un rallye pour traverser en groupe ou du moins en gardant un contact radio. Il y a des bateaux en provenance des Tonga mais aussi de la Nouvelle-Calédonie et des Fiji qui participent au rallye pour se diriger en NZ à l'abri des cyclones. On a connu encore tout plein de nouveaux bateaux lors de notre dernière escale dans la capitale des Tonga, soit à Nuku'alofa. Nous étions tout un groupe à attendre la bonne fenêtre météo pour partir. La traversée vers la Nouvelle-Zélande n'est apparemment jamais très agréable avec des vents forts dans le nez. Un s'attend donc à se faire taper le derrière pour les 10 jours à venir, pas agréable mais rien de dangereux. Selon les prévisions actuelles, on aura à faire pas mal de moteur au cours de la traversée faute de vents constants mais comme nos réserves de diésel sont pleines, nous préférons ceci à des vents trop forts. Notre gréement en a vu de toutes les couleurs dans la dernière année et demie et le capt a bien hâte de le faire ré-inspecter, le moins de gros temps nous frapperons, le mieux ce sera. Notre Cat Mousses est essoufflé. Au moins c'est avec une coque propre comme un sou neuf que nous entreprenons la traversée. On y a travaillé fort, dans une mer assez houleuse mais surtout pas mal froide, pour débarrasser la coque et les hélices de tout résidu, algues, coquillages et autres. Les inspecteurs sont mieux de sortir leur loupe à notre arrivée en Nouvelle-Zélande et je les mets au défi de nous trouver des coquillages sous la coque. On a frotté si fort qu'il ne reste pratiquement plus de trace de la peinture anti-salissure qu'il faut de toute façon refaire en NZ. René a aussi installé une pompe pour vider de façon automatique l'eau qui s'infiltre dans le compartiment avant tribord. Comme ça nous n'aurons plus à braver le mauvais temps pour aller ouvrir et vider à la main ce compartiment qui se remplit d'eau.
A Nuku'alofa, nous avons fait nos dernières emplettes avant le grand départ. Il était temps, nos réserves étaient devenues si basses que le dernier matin avant d'aller faire nos achats il ne restait plus la moindre céréale, gruau au autre à bord de Cat Mousses, ni pain, ni oeufs. C'est pas mêlant Catherine a décidé de manger du poisson froid pour déjeûner ce matin-là! Nous avons eu beaucoup de plaisir lors de cette escale et avons fait plein de rencontres intéressantes. Il y a, à cet endroit, un 'Resort' tenu par une femme qui se présente sous le non de 'Big Mama'. Elle est une légende sur cette île. Depuis sept ans, elle accueille les navigateurs en leur offrant une panoplie de services pour les aider dans leurs préparatifs de traversée. Le premier soir elle nous a reçus avec un BBQ où nous apportions seulement notre viande. On payait un petit montant par personne et eux cuisaient pour nous la viande et fournissaient les salades, les couverts et tout. Il y avait de la danse et ce fut une bien belle soirée mais rien en comparaison de la soirée du 30 octobre. Ce soir-là, elle a reçu gratuitement tous les navigateurs du rallye vers la NZ à son restaurant. Le buffet était sans limites, ils y servaient, cochon grillé, poissons divers et spécialités locales. Puis, comme c'était également le soir de l'anniversaire de 'Mama', ils nous ont servi un gâteau au chocolat ultra-moelleux garni de glaçage au fromage à la crème. J'ai encore l'eau à la bouche de ce succulent gâteau! Nous avons fêté pas mal, nous avons bien ri et dansé. Le lendemain, comme c'était le 31 octobre, les enfants ont revêtu leurs costumes d'Halloween et ont fait le tour du mouillage en annexe pour aller faire leur collecte de bonbons. Contre toutes attentes, ils sont revenus avec leur panier plein à ras bord de gâteries de toutes sortes. Wasabi et Alexandre IV avaient bien sûr largement contribué mais les enfants ont été très surpris de la générosité de tous ces bateaux qui n'ont plus d'enfants depuis belle lurette mais qui les ont gâté sans borne, c'en était presque gênant. Les enfants ont grandement apprécié et ont décrété à l'unanimité cet Halloween comme leur meilleur à vie. Ils le racontent dans leurs mots dans leur journal de bord respectif.
Il y a quelques jours, il est arrivé un petit souci à Bryan de Wasabi. Un nerf s'est coincé entre deux de ses vertèbres lombaires et il a complètement figé pendant plusieurs jours et est resté étendu à même le plancher de sa cabine pendant au moins cinq jours avant de réintégrer le lit sur ordre d'un ami médecin allemand du mouillage. Ils ont dû se prendre à quatre hommes pour le déplacer et l'opération a duré deux bonnes heures. Comme il n'était pas question de les laisser seuls et qu'il fallait rallier Nuku'alofa pour les derniers préparatifs avant le départ pour la NZ, les enfants m'ont portée volontaire pour aller aider Isabelle et c'était une bien bonne idée, quoiqu'Isabelle et moi étions un peu nerveuses. René a navigué seul avec les enfants pour une navigation de nuit de 17 heures. Finalement Isabelle et moi avons complété notre mission avec succès. On ne se savait pas aussi expérimentées, mais finalement nous avons tout fait le travail seules de A à Z et on s'est rendues à bon port, et ce de nuit. Faut croire qu'on a pris de l'expérience dans les dernières années. J'avoue que naviguer sur leur voilier est pas mal moins physique que sur Cat Mousses. Sur Cat Mousses ces temps-ci, il y a tellement de maintenance à faire que juste partir les moteurs nécessite de rentrer tête la première dans la chambre des moteurs pour aller 'primer' la pompe à eau, je ne sais trop comment. Je m'imagine faire ça! Sur Cat Mousses rien n'est simple, on ne peut pas juste tourner la clé comme tout le monde alors je me demande vraiment ce que j'aurais fait à sa place de devoir naviguer Cat Mousses seule. Cette nuit-là, René s'est bien débrouillé seul avec les enfants, mis-à-part le fait qu'il a failli perdre l'annexe dont une des cordes a cédé. Elle s'est retrouvée suspendue à une seule corde. Je m'imagine au milieu de la nuit dans la mer agitée que nous avions à essayer de grimper en équilibre pour aller patenter un système de 'straps' de broche à foin pour ne pas échapper l'annexe à la mer! Sur Wasabi, pour monter la grand-voile et le génois il suffit de peser sur un bouton, quel bonheur! J'étais bouche bée quand j'ai vu ça. Sur Cat Mousses René se tue à la tâche à chaque fois qu'on hisse la grand-voile. Enfin, il reste que le malheur de Bryan nous a tous fait réaliser qu'il faut être prêt à toute éventualité sur un bateau. La situation de Bryan ne s'améliorant que très peu, Isabelle et lui vont partir pour la Nouvelle-Zélande en avion et ils ont trouvé un équipage pour traverser leur bateau. En attendant, ce soir (02 nov), j'ai pris mon courage à deux mains et je suis descendue dans la chambre des moteurs pour aller 'primer' à la main, la pompe à eau du moteur babord. Rien de plus simple. Il s'agit simplement de dévisser un collet, forcer comme une forcenée pour réussir à sortir la 'hose' pris à la serre par la succion, y entrer un entonnoir, remplir la 'hose' d'eau de mer, puis remettre le tout en place et revisser le collet. Simple non! Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué. Donc René, tu peux maintenant dormir tranquille, je sais 'primer' une pompe à eau. mais juste celle de bâbord pour le moment parce que pour celle de tribord. alors là, ça se corse. Il me faudra un peu plus d'entraînement pour celle-là! Il y a deux ou trois étapes à faire en prenant garde de ne pas se faire coincer les doigts dans les poulies qui tournent. Des heures de plaisir! Si possible j'aimerais autant que mon capitaine ne barre pas du dos avant que ses moteurs ne fonctionnent à nouveau rondement.
Notre navigation vers la NZ se passe bien jusqu'à maintenant. Hier nous avons pêché un énorme mahi-mahi aussi grand que Thomas, c'était une femelle. Depuis notre récente rencontre avec Silvio et Liliane du bateau brésilien 'Matajusi', René ne cesse de vouloir expérimenter de nouvelles choses. Silvio, Jacques et lui ont fait beaucoup de pêche ces derniers temps. Ils partent vers 20:30 le soir , il fait froid et les nuits sont noires, ils vont sur les bords des récifs pêcher jusqu'à 23:30. C'est du vrai sport, l'autre soir Silvio est tombé face face avec un 'Lemon Shark', pas gentils ceux-là. Silvio est tout un plongeur en apnée, il a 61 ans et il descend encore facilement à 20 mètres. Avant il faisait des compétitions et descendait à plus de 40 mètres, il leur a enseigné de nouvelles techniques de respiration avant de plonger. Avant nos hommes s'hyperventilaient mais aujourd'hui c'est différent. Ils forcent l'air dans leurs poumons et gardent leur respiration. Ils font cela trois fois avant de prendre une bonne inspiration et de plonger. Cela à pour effet d'augmenter le volume de leurs poumons. Ils ont ainsi grandement amélioré leur temps d'immersion. Ensemble ils sont comme des enfants ces hommes. L'autre jour, Silvio et René sont revenus du marché avec chacun une pieuvre et Silvio est venu sur Cat Mousses pour nous enseigner comment nettoyer, préparer et cuire la pieuvre au presto. Il faut d'abord tourner la tête à l'envers et en retirer une poche contenant l'encre et les intestins, il faut ensuite enlever les yeux puis la bouche. De façon surprenante, la bouche est en fait un espèce de bec de perroquet très dur. Pour cuire la pieuvre, il suffit de la faire légèrement revenir et rosir dans un peu d'huile d'olive et de l'ail. Un peu de poivre et sel, ¼ t de vin blanc et hop on ferme le couvercle de la cocotte vapeur (presto) et on ne cuit que 5 à 7 petites minutes une fois qu'on entend le 'Psh! Psh! Psh!'. Et voilà le tour est joué mais le secret dans tout ça c'est d'attendre au lendemain avant d'ouvrir le couvercle du presto car c'est lors du lent processus de refroidissement que se complète la cuisson. Vraiment le résultat est surprenant, nous n'avions jamais mangé de pieuvre aussi tendre et ce sans avoir à la battre ou autre. Une fois le presto ouvert, j'ai coupé la pieuvre en morceaux et je l'ai marinée avec des oignons, échalottes, tomates en morceaux, coriandre, huile d'olive et le jus de cuisson du presto. Je reviens donc à notre mahi-mahi femelle. Silvio nous a aussi enseigné à garder la poche des oufs de la femelle. J'ai ensuite fait frire ces oeufs à la poêle avec de l'huile et de l'ail et quelques épices. Vraiment, parfois je me demande si on ne va pas bientôt se mettre à manger les yeux de poisson tant qu'à faire! On apprend plein de choses avec cette mafia brésilienne. Ils connaissaient bien sûr nos amis de Samba. Ils sont toute une communauté de bateaux brésiliens 'Pager', 'Bicho', 'Sarava', 'Beduina', 'Canela', 'Matajusi'. On a bien du plaisir en leur compagnie et ils nous font beaucoup penser à 'Samba' resté à Tahiti pour un an ou deux. On a beau les écouter à la radio, on ne comprend pas grand-chose de leur charabia de portugais. Je comprends quand je lis des instructions en portugais mais le comprendre verbalement c'est autre chose.
Nous avons décidé de nous arrêter au récif de Minerva chemin faisant vers la NZ étant donné le peu de vent. Contrairement à tous les autres bateaux du rallye, nous allons filer vers la partie sud du récif qui n'est pas très connue des navigateurs. Comme ça nous serons seuls avec Alexandre IV, Matajusi, Pager et Beduina. Les hommes ont la ferme intention d'y passer deux jours à la recherche de ces chères cigales de mer, qui ressemblent à des langoustes mais sans les pinces et les antennes, il y a apparemment également tellement de langoustes, qu'elles sautent pratiquement dans ton annexe, ça reste à voir. Nous aimons bien la cigale car sa chair a un goût délicat exquis. De plus, elles sont tellement faciles à cuire et arranger. Thomas est devenu notre spécialiste pour ouvrir ces bibittes et nous les préparer. Nous nous sommes d'ailleurs faits plusieurs festins de ces crustacés depuis quelques temps. Un après-midi après les classes on s'est fait un festin inoubliable sur la plage, juste Wasabi, Alexandre IV et nous. Nous avions du crabe, des cigales en quantité et des poissons en ceviche. Ca nous sortait par les oreilles. On a bu, on a ri et on s'est amusés sans bon sens. On s'est évidemment passés de souper ce soir-là. Un jeu de société des drapeaux du monde avec les enfants, quelques grignotines, puis nous étions tous au lit. Notre collection de coquillages s'est considérablement agrandie ces derniers temps aussi. Je ne m'étais jamais vraiment intéressée aux coquillages auparavant mais les enfants m'ont fait découvrir de véritables bijoux de coquillages sur les plages de Tonga. Espérons seulement qu'on ne nous les confisquera pas en arrivant en Nouvelle-Zélande. On a à regret, dû faire cuire notre animal de compagnie, membre de l'équipage, 'Peter the Crab' (un crabe de cocotier en provenance de l'atoll de Mopélia en Polynésie française), la semaine dernière. Il était délicieux.
En ce moment le temps se rafraîchit de façon drastique. Les nuits sont de plus en plus fraîches et la mer est aussi très froide. René et moi commençons à penser nous équiper d'une combinaison de plongée longue plutôt que notre courte. Nous avons sortis nos polaires et nos manteaux. Heureusement, même après un an et demi, ils vont encore comme un gant aux enfants. J'ai bien peur qu'ils en auront bien besoin en NZ. Le temps des douches prises, nus comme des vers, sur le patin arrière de Cat Mousses est pas mal révolu. Il faudra maintenant décréter une des deux salles de bain comme douche officielle et se mettre à utiliser de l'eau chaude sur Cat Mousses.
Bon alors je crois que ça fait le tour, ouf déjà 4 pages! Je me suis encore emportée. Je n'écris pas souvent mais quand j'écris, j'ai tendance à m'emporter un peu. En espérant ne pas être trop ennuyante!
Salutations de l'équipage du Cat Mousses à tous nos lecteurs.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire