mercredi 25 mai 2011
CAT MOUSSES - René et la famille en PAPOUASIE
24 mai 2011Panasia, Lousiade, Papouasie Nouvelle-Guinée
Récit 172 - L'île 'déserte' de Panasia
Comme promis, je débute ce récit avec un peu plus de détails sur la Papouasie, ce pays situé à un peu plus de 100 miles au nord-est de l'Australie. Nous nous trouvons actuellement dans les Louisiade, un groupe d'îles à l'est du continent principal. La Papouasie et la Nouvelle Guinée ont été combinées avec le Papua and New Guinea Provisional Administration Act, adopté plus ou moins un an après le repli des Japonais en 1945. Le pays est complètement indépendant depuis le 16 sept 1975.
Le peuple indigène d'ici est l'un des plus hétérogènes du Pacifique puisque la Papouasie, avec ses 178 700 miles carrés, est constituée de plusieurs centaines de petites communautés disparates d'une centaine de personnes chacune.
Cette disparité au niveau de la langue, de la culture et des traditions de ces communautés ne fut pas sans générer plusieurs conflits inter-tribal. Il n'existe pas moins de 700 dialectes différents parmi ces différentes tribus de la Papouasie Nouvelle-Guinée mais leurs langues les plus universelles, voire communes, sont le Pidgin et le Hiri Motu.
Nous sommes présentement dans la tribu du groupe de Misima et nous réalisons de plus en plus, que plusieurs adultes ne parlent pas du tout anglais. Seuls les plus privilégiés le parlent, c'est-à-dire ceux qui ont eu l'argent pour payer les frais scolaires car c'est à l'école qu'ils apprennent l'anglais, une fois leur propre langue maîtrisée.
A ce titre, nous avons visité l'école du petit village de Panapompom. Cette école enseigne le cours préparatoire (maternelle), première et deuxième année. Franchement, pour une école où les enfants sont assis à même le sol de terre dans la petite case où on leur enseigne, c'est plus qu'impressionnant de voir la structure et la qualité de l'enseignement qui est prodigué et tout le matériel disponible.
Le seul ennui c'est qu'il y a des frais assez importants, et bien que l'école soit supposément obligatoire, plusieurs enfants ne semblent pas assister très assidûment à leurs classes. L'économie du pays repose surtout sur l'agriculture, quoique qu'il y a eu une période d'exploitation minière de cuivre à partir des années soixante, majoritairement sur l'île de Bougainville.
En certains endroits comme les villes de Lae, Madang, Rabaul et Port Moresby, il y a de grosses plantations commerciales de coconut, cacao et caoutchouc. Dans les endroits plus élevés, comme Goroka et le Mt. Hagen, la café et le thé sont aussi cultivés.
De façon générale toutefois, c'est le yam, le taro, la canne à sucre, les bananes, le coconut et la papaye et quelques légumes qui sont cultivés un peu partout. Comme nous aimons à nous tenir dans les coins les plus isolés et les plus retirés, nous n'avons toujours pas vu la couleur d'un kina, unité monétaire du pays. A date, nous ne subsistons que du fruit de nos échanges avec les locaux.
Les forêts humides luxuriantes des îles laissent croire que les sols sont très fertiles mais en fait, il paraît que la culture n'est pas évidente ici. Le sol est très rocailleux et très peu profond dû à l'érosion que génèrent les pluies. Nous entrons tranquillement dans la saison sèche, quoique c'était difficile à croire sous les pluies torrentielles de la semaine dernière.
Cette semaine par contre, il fait un temps magnifique et les vents ont diminué drastiquement. Heureusement pour nous, sinon nous n'aurions jamais pu nous rendre jusqu'ici. Les vents sud-est qui s'établissent à partir du mois de mai sont typiques de la saison sèche et c'est précisément ce que nous vivons présentement. Lors du recensement de 2000, le pays comprenait environ 5 130 000 habitants mais cette population diminue graduellement avec l'expatriation vers les grands centres.
Il y a encore quelques années, les navigateurs étaient mis en garde de rester à 50 miles des côtes à cause d'activités hostiles entre groupes de sécession indonésiens pour le mouvement pour un Free Papua. Il existe aussi des groupes d'insurrection sur certaines îles comme Bougainville et Buka. Il continue apparemment d'y avoir certains problèmes d'effractions par ce qu'ils appellent les 'rascals' (voleurs/violeurs), surtout dans les grandes villes comme Port Moresby mais le problème semble vouloir s'élargir vers Madang, Lae et Rabaul depuis quelques années.
Nous serons plus vigilants lors de notre passage à Rabaul mais on nous a dit que ça valait la peine d'y passer car cette ville a longtemps été vue comme une perle du Pacifique, jusqu'à ce qu'une irruption volcanique en enterre une grosse partie sous 10 à 15 pieds de cendres en 1994.
C'est d'ailleurs près de cet endroit qu'il y a eu un tremblement de terre la semaine dernière, peu après notre arrivée. Parlons maintenant de Panasia, l'île sur laquelle nous nous trouvons actuellement dans les Louisiade. On avait entendu qu'il s'agissait d'un très beau lagon et qu'il n'y avait personne qui vivait ici sur cette île.
A notre arrivée, quelle ne fut pas notre surprise de voir apparaître un local et son fils dans leur pirogue. Ici nous étions le premier bateau à passer cette année, ce qui explique que dès qu'ils ont aperçu notre voile, dans la passe, Mackenzie et son fils se sont mis à pagayer contre le vent et les vagues pour parcourir les 3-4 miles pour venir nous visiter.
Inutile de dire qu'ils semblaient bien heureux d'avoir des visiteurs. Mackenzie nous a pris sous son aile et s'est très bien occupé de nous lors de notre passage. Il nous a emmené visiter une grotte (Limestone Cave), dans laquelle il y avait un petit lac sous-terrain, fort joli. Au retour, nous avons emmené Mackenzie dîner sur le bateau pour le remercier de l'excursion à la caverne. Puis est arrivée une autre famille dans leur pirogue, ils venaient passer quelques jours dans leur maison sur l'île pour venir travailler à leur jardin. Ils vivent en alternance sur deux îles différentes.
Ces nouveaux amis, (John, Gwen, leur fils Emmanuel, ainsi que Rodney (frère de John)) sont aussi montés à bord mais ne voyaient plus l'heure de partir. Il semble que ce soit la norme ici et que les locaux montent souvent à bord des bateaux. Cette pratique est un peu nouvelle pour nous. Ainsi, j'ai fini par leur servir à souper sinon nos hommes n'auraient jamais pu partir pour leur pêche.
Mes nouveaux amis, même après souper et même après que les hommes eurent quitter pour la pêche, ne finissaient toujours pas par partir mais je me suis montrée convaincante et après quelques dons de sucre et de thé je leur ai gentiment détaché leur pirogue?MESSAGE! Ils ont bien reçu mon message et ont quitté, c'est que les enfants commençaient à s'impatienter un peu. Les hommes ont rapporté trois poissons et deux langoustes de leur pêche ce soir-là. Une belle grosse langouste verte pêchée par Thomas et une mini pêchée par papa. Fiston était pas mal fier de son coup et papa a finalement redonné la liberté à sa petite prise pour que bébé grandisse et devienne bien gros.
Mackenzie, comme son île est un peu loin, a passé la nuit sur Cat Mousses, sur un matelas bleu du cockpit après la pêche. J'ai mis toutes les conditions gagnantes de notre côté pour éliminer les odeurs un peu fortes en lui offrant une douche avec savon et shampoing s.v.p. ainsi que de nouveaux vêtements; un short et t-shirt de René. Après avoir ramené Mackenzie sur son île de Little Panasia, le lendemain matin, il nous a emmené visiter une autre grotte (Skull Cave), soit une caverne où on pouvait trouver des ossements divers dont plusieurs crânes, sûrement des vestiges d'ancien cannibalisme.
Disons que nous étions fort heureux d'avoir notre ami Mackenzie car sans lui nous n'aurions jamais trouvé l'endroit. C'était fort impressionnant et l'expédition en soi a été une très belle expérience que nous ne sommes pas près d'oublier. Le sentier et les arbres grouillaient de fourmis rouges. On avait l'air touristes un peu je dois dire ce matin-là.
En effet, on pouvait difficilement cacher nos origines, soient nos racines de gens de la ville, en dansant d'un pied à l'autre à chaque arrêt pour ne pas nous faire piquer! Mackenzie, lui, marchait et grimpait pieds nus sur les rochers super coupants. Comme je viens de terminer le roman de Ingrid Bétancourt 'Même le silence a une fin' je la revoyais, elle et le groupe d'otages, captifs au beau milieu de la jungle colombienne grouillante de bestioles de toutes sortes. Ouf, pas quelque chose que j'aurais voulu vivre, comme personne d'ailleurs.
Ce matin-là, Mackenzie nous a fait une prestation de grimpage de cocotier et il nous a fait goûter diverses choses comme le coco vert et son eau, versus, les cocos d'âge mature à la chair beaucoup plus ferme et au goût beaucoup plus prononcé. Aussi il nous a ouvert de délicieuses noix trouvées à terre. J'étais contente qu'Hugo aie la chance de goûter toutes ces nouvelles choses. Il est ressorti enchanté de son expérience de ce matin-là.
Même si nous n'avions pas de Kina, nous avons largement récompensé Mackenzie et sa famille pour ces deux belles journées en leur offrant des vêtements pour son fils et lui, sucre, riz, hameçon, cahier,crayon, antibiotique contre les infections aux yeux, graines pour ensemencer des fines herbes, laitue, fraises, etc. Je leur ai même cuisiné un plateau de muffins aux bananes alors je crois qu'ils étaient contents.
Ensuite la famille CAT MOUSSES et Hugo avaient envie d'être un peu seuls et d'aller jouer les Robinson Crusoe sur une île vraiment DÉSERTE. On s'est arrêtés sur une magnifique île, loin de toute civilisation. On s'y est fait un feu, il y a longtemps que nous n'avions pas fait notre fameuse banique (pain amérindien), saucisses et guimauves sur le feu. C'est un de nos classiques et Hugo a bien aimé cette activité.
On en a profité pour brûler nos vidanges ou crasses comme dirait Hugo. Puis comme si ce n'était pas encore assez, il restait encore une pêche de nuit en famille que nous nous étions promise dans un super beau spot que René avait découvert, très semblable à ses spots chanceux de pêche aux Tonga. Il ne s'était pas trompé, la pêche fut là aussi très bonne quoiqu'un peu stressante.
On y a vu plein de beaux spécimens. Tortue et raie la veille mais ce soir-là, il y avait, en plus d'une variété impressionnante de poissons de toutes sortes, crabes, langoustes et tout ? des amis requins. Disons que des sept plongeurs que nous étions au départ, nous n'étions plus que cinq en moins de dix minutes, puis plus que trois après un autre 20 minutes. Il fallait surveiller car à trois reprises nous sommes arrivés face à face avec un requin et la troisième fois, le requin était pas mal gros.
Ils ont beau être gentils, ils étaient quand même attirés par notre sac de poisson. Il y a une semaine d'ailleurs, René et Thomas étaient tombés nez à nez avec un requin de récif. Il paraît que le requin est resté tellement surpris et qu'il a été tellement aveuglé, qu'il était complètement désorienté. Il se cognait partout contre le récif, contre René puis contre le récif encore. Les gars n'ont pas insisté et sont revenus assez vite.
Disons qu'hier soir, à la rencontre du troisième requin, René n'a pas eu à nous prier, Nicolas et moi, de retourner à l'annexe, il était pas mal gros ce requin là. Mais en nous retournant, nous sommes tombés nez à nez avec une énorme langouste. Too bad le requin, on ne pouvait passer devant cette belle langouste! Le requin pouvait bien attendre un peu, on a essayé de l'oublier le temps de ramasser cette deuxième belle langouste verte.
Puis on s'est dit que deux langoustes et un poisson perroquet nous suffiraient pour ce soir-là et on a terminé l'expédition de pêche. Pauvre Hugo, on lui en fait voir de toutes les couleurs mais surtout, il va virer langouste. Lui qui n'en raffole pas? le pauvre? il doit pâtir un peu de mes menus. Ceviche de poisson et wraps de langouste pour le dîner, puis spaghettis nappés de crème à l'ail et à la langouste pour le souper. ENCORE de la langouste! Et il en reste pour le dîner de demain. Il dit quand même qu'il commence à se faire au goût.
J'avoue que le souper de ce soir était digne d'un repas de grand restaurant. Un délice! Ce matin, René et Hugo font une dernière visite à John. C'est qu'il nous a demandé de lui expliquer quelques fonctions du téléphone cellulaire qu'il venait tout juste de s'acheter et que nous lui avions chargé sur le bateau. Hugo, issu d'une génération plus technologique que le nôtre, s'est vu attribuer cette tâche par le capitaine.
Il a pré-programmé quelques numéros de téléphones et entré la date, l'heure etc. Ensuite nous avons levé l'ancre pour changer de mouillage et rallier l'île de Kamatal, un autre beau lagon tranquille. C'est vraiment impressionnant de voir toutes les pirogues à voile ici. De toutes les îles du Pacifique, c'est le premier endroit où on voit les locaux utiliser la voile sur leur pirogue.
Cette utilisation du vent leur permet de se déplacer très loin et par le fait même, leur garantit toujours de belles pêches. De par le peu de cochons et de poules rencontrés sur les îles, on voit bien que les locaux se nourrissent principalement de poisson.
Parlant de pêche, nous avons eu plusieurs touches sur nos lignes à la traîne aujourd'hui et même qu'à un certain moment, un requin s'est laissé taquiner par un de nos leurres. Il a essayé de mordre à quelques reprises mais ne s'est pas laissé berner. C'était la première fois que ça nous arrivait, on voyait sa nageoire dorsale qui fendait l'eau derrière nous. Nous sommes arrivés à Kamatal, encore dans les Louisiade, en fin de PM et n'avons encore vu personne.
Je ne sais pas si l'île est habitée mais je sais toutefois qu'elle est peuplée de moustiques. Ouf, de gros bétails à part ça! Une chance qu'on prend bien nos médicaments contre la malaria. Mais blague à part, nous avons entendu des voix sur l'île. Elle est habitée à coup sûr, nous les rencontrerons sûrement à la première heure demain, surtout qu'ici aussi on doit être le premier bateau à passer cette année.
Disons que nos guides nautiques et informations concernant la Papouasie NG sont assez limités, alors y naviguer est un peu stressant pour le capitaine. Les chartes sont plus ou moins fiables, il faut être bien vigilants.
Pour nos destinations, on se laisse guider par nos intuitions et ce que les locaux nous recommandent et à date nous sommes enchantés de nos découvertes. Nous pourrions passer plusieurs mois en Papouasie mais nous avons encore un programme de navigation assez ambitieux cette année alors nous ne nous éterniserons pas trop et pousserons assez rapidement vers Yap.
Finalement, pour terminer, nous avons reçu, ce matin, un avis de notre compagnie d'assurance de bateau que d'ici un mois nous ne serions plus assurés. Tu avais raison Judith, nous n'échapperons pas à leur nouvelle règle, ils ne veulent plus assurer les Canadiens. Ho well, ce n'est pas ici dans les Louisiade qu'on va se mettre à magasiner les firmes de courtiers en assurances. Il faudra vivre SANS pour les deux années à venir, tout comme pour nos assurances médicales. Espérons seulement que le pari sera bon et que la chance sera de notre côté.
Sur ce, assez de blabla, c'est l'heure du dodo.
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