Nouvelles des Navigateurs

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entre les navigateurs, familles et amis du Réseau du Capitaine et de la CONAM.

mercredi 19 janvier 2011

ÉTOILE DE LUNE - Dom et Nat à Tahiti








Le dimanche matin est un moment particulier de la vie des îles des Tropiques. Partout, il règne une ferveur à se rendre à la messe. Celle qui n'existe plus même dans nos campagnes occidentales. Celle qui, aujourd'hui encore, réunit dans les îles, les membres de familles endimanchées, ravis de discuter sur le parvis de l'église. Dans la Caraïbe, nous admirions les petites filles, vêtues de froufrou de satin, coiffées de couettes et leurs mamans, si fièrement mises de robes de madras ou en tissus chatoyants. Toujours si belles, si rayonnantes, leurs Créoles en or dessinant leurs oreilles. Les hommes, l'air aussi pincé que leur pantalon repassé et leur chemise blanche, suivent dignement le cortège de volants et de dentelles soulevées par l'alizé. Dans les pays latins, nous avions perdu ce cérémonial endimanché, la décontraction vestimentaire y est pratiquée autant que la prière.

En Polynésie française, nous retrouvons une population fervente et endimanchée.

Les vahinés à la fleur de l'âge domptent leur chevelure débridée dans de sévères tresses qui s'échappent de chapeaux blancs au liseré bleu. Leurs formes assujetties dans un monacal chemisier blanc, fermé d'une cravate bleue serrée au cou. Les jupes unies cachent les genoux. Heureusement qu'il y a 7 jours aux semaines, et qu'il en reste 6 aux filles, pour laisser leur imagination s'enflammer dans un flot incandescent de fleurs d'hibiscus sur tissus de couleurs vives!

Mais ne nous emballons pas. Aux abords de l'église, les jeunes filles, le front recueilli, consentent au plus puritain idéal du protestantisme. Une vraie gravure de la belle Rarahu chantée par Pierre Loti, dans son si célèbre mariage.

Indubitablement, les Anglais ont laissé de grosses cicatrices dans l'art dominical. Ils ne sont pas seuls à subordonner l'art vestimentaire de la population. Aujourd'hui encore, protestants et catholiques se partagent, à égalité, 76% de la population de Polynésie française. Les autres églises sont moins fréquentées, mais pour autant, elles façonnent, elles aussi le mode de vie de la population. Ainsi, les Mormons ou l'Eglise de Jésus Christ des Saints des Derniers Jours rassemblent 6.5% de la population, tandis que les adventistes en réunissent 5.8%. De plus petites églises, comme les Sanito (Communauté du Christ), Témoins de Jéhova existent aussi. Quant aux autres obédiences (Judaïsme, bahaïsme, bouddhisme...) elles se partagent 5.3% du reste des insulaires. Au jour du culte, une seule coutume réunit tout ce petit monde: le chapeau!

Si les jeunes filles sont engoncées dans leur tenue religieuse, les femmes d'âge plus mûr, quant à elles, s'offrent des toilettes du dimanche beaucoup plus recherchées. Bien que "ce si joli sein au bouton doré si rebelle au corset", comme dirait Monsieur Loti, reste sagement voilé, la mise stricte des juniors est jetée au diable! (Pardon, je m'emporte...) Fi donc des uniformes, le blanc aveuglant, trop virginal s'adoucit. La fantaisie rejaillit. Sur les tissus, en imprimé ton sur ton, l'hibiscus s'immisce dans le culte pastoral. L'expédient ingénieux concilie la prière aux frivolités des parures. Quel plus beau moyen pour sortir du rang que le chapeau? Les femmes polynésiennes excellent dans l'art du beau. Et cet art s'exprime en virtuose dans leur couvre-chef ! Car ici, les ordres viennent de haut... de plus haut que le prêche, de plus haut que la croix... Ils jaillissent de ces coiffes insensées, qui chaque dimanche tutoient les nuages. Broderies, tressages, dentelles de pandanus, voici les femmes couvertes, mais avec quelle majesté!

Le blanc de rigueur s'alanguit entre le lait caillé et le beige sucré. Une note de couleur vive attire l'attention. Mais bien sûr, madame aux origines chinoises fêtera bientôt l'année du lièvre. Une guirlande rouge s'échappe négligemment de la conception immaculée. Le blanc, tant prôné par les missionnaires, s'égare à la moindre distraction. D'une mousseline vaporeuse s'échappe, non pas le bleu sans vie requis, mais un bleu électrisé par le génie du chapelier. Voyez, là-bas, ces perles d'un moiré remarquable, ce lacet d'or qui les unit, dans une capeline ajourée. Et ci-devant, quelques violettes viennent agrémenter la coutume.

Je ne sais d'où vient cette pratique du chapeau, mais elle me paraît, par tant d'ostentation, faire un clin d'oeil magistral (pour ne pas dire un bras hasardeux) aux préceptes des missionnaires. Et du coup, les messes s'apparentent à de délectables parades dominicales.

Ha! Le tempérament polynésien n'a pas fini de nous surprendre!

A plus, pour d'autres clins d'oeil de Tahiti...
Nat et Dom
www.etoiledelune.net

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