Nouvelles des Navigateurs

Ce blogue a été conçu par Nycole - VE2KOU et se veut un point de rencontre
entre les navigateurs, familles et amis du Réseau du Capitaine et de la CONAM.

samedi 14 mai 2011

CAT MOUSSE - René et la famille vers la Papouasie


13 mai 2011En navigation vers la Papouasie Nouvelle-Guinée
Récit 170 -

Enfin chez les Papous Plus que quelques heures ? Voilà maintenant six jours que nous naviguons, il est 02h15 AM, je suis de veille, il ne reste qu'un maigre 15 miles nautiques à parcourir avant d'arriver à destination.

Nous essuyons grain par dessus grain depuis hier, ils semblent tous nous passer dessus sans exception. Fort heureusement, nous sommes sur vent arrière, ce qui nous facilite grandement la tâche. Toute cette pluie aura au moins l'avantage de nettoyer le bateau de toutes les fientes laissées par nos amis les oiseaux, les fous à pieds rouges, qui continuent de nous visiter sans relâche.

Ce soir, il y en a même un qui est venu mourir sur Cat Mousses, prenant bien soin de nous régurgiter le contenu de sa dernière pêche sur le pont, pour ensuite se vider les intestins, avant de s'élancer dans le vide, dans un élan de désespoir. Peut-être s'était-il pris un coup d'éolienne, c'est assez violent comme rencontre pour un oiseau, surtout quand le vent souffle à plus de 20 noeuds.

Ce soir, nous avons vécu un petit moment d'adrénaline en franchissant le Jomard Channel, soit un passage qu'empruntent tous les cargos qui naviguent entre la Nouvelle-Zélande/Australie et les destinations asiatiques. Si nous n'avions pas vu plus de deux ou trois paquebots en six jours de navigation, nous avons été servis lors de ce passage. En effet, au moment précis où l'on s'y engageait, nous avions des cargos qui nous croisaient de toute part.

Avoir un petit cargo de 190 m qui nous pousse dans le dos et un autre qui vient direct sur nous à sens contraire dans un petit entonnoir de moins de trois miles de large, ça peut être impressionnant. Surtout quand on navigue dans des creux de vagues atteignant les 5 à 6 mètres, qu'il fait un temps de chien et que le mur de pluie et le brouillard nous empêche de distinguer des bateaux qui nous croisent à moins d'un demi mile nautique. Notre équipier a semblé trouver l'expérience assez intense. Nous avons su plus tard, que de 300 à 500 bateaux par mois franchissent ce passage, ce qui fait environ 10 à 15 par jour.

On dirait bien qu'ils se sont donnés le mot pour passer en même temps que nous ce soir-là, car nous avons bien dû en rencontrer cinq ou six en l'espace d'une heure. L'écran radar était... dirait-on, assez occupé. Des bateaux de toute part, la terre, le récif, sans compter l'énorme nuage de pluie qui nous planait au-dessus de la tête sans vouloir nous lâcher d'une semelle. Ça s'est très bien passé mais... ça valait la peine d'être vu.

On a réussi à garder Hugues debout avec nous jusqu'à presque 22h00 PM pour qu'il puisse assister à ce moment, lui qui, dorénavant est souvent au lit aussi tôt que 20h00 le soir. Après tout, qu'y a-t-il d'autre à faire que de se coucher quand la nuit tombe et qu'on se fait brasser comme dans une machine à laver? Autant se coucher et ça Hugues l'a bien compris.

En fait, il est devenu si sage qu'il est certain que ses parents ne le reconnaitront pas à la lecture de ce récit. Depuis le début de la nuit, nous jouons à nous ralentir et à tuer le temps jusqu'au lever du jour, car il n'est évidemment pas question de franchir les récifs de nuit. Il ne reste qu'un minuscule bout de toile en guise de voilure car il faut se ralentir à une vitesse de moins de trois noeuds, ce qui n'est pas une mince affaire considérant que le vent grimpe à 25 noeuds à chaque grain que nous essuyons.

Je dois mentionner que vers minuit, René et moi avions pris la décision de nous diriger vers l'île de Panapompom plutôt que celle de Misima (l'une des deux seules îles où l'on pouvait faire notre entrée au pays selon les autorités australiennes). On devait aviser les douanes de Misima de notre arrivée mais après maintes tentatives de fax, de la part de notre équipe de soutien terrestre, nos efforts furent vains.

Ainsi, comme on passait devant une belle île offrant une bonne protection contre les vents qui s'annonçaient aussi forts pour les trois jours à venir, nous prîmes la décision d'en faire notre premier arrêt. Surtout qu'on avait entendu dire qu'en 2009, certains navigateurs avaient pu y faire les douanes. Finalement, il s'est avéré que notre flair était bon car il y a ici un bateau pilote qui offre les services de douanes.

Les douaniers, lorsqu'on leur a annoncé notre intention initiale d'aller 'clairer' à Misima, sont partis d'un grand rire nous disant que là-bas il n'y a que la quarantaine et pas de douanes. Tout ça pour dire, que les procédures d'entrée au pays pour les navigateurs sont pour le moins vagues en cet endroit. Par contre, elles ont l'avantage d'être très, très, très relax.

Nous avons bien fait de nous fier à notre instinct et de nous arrêter ici. Me revoici, après deux jours parmi les Papous. Aussitôt l'ancre descendue, nous avons tôt fait de recevoir notre premier visiteur, un homme aux cheveux blancs, tout sourire avec ses dents toutes rouges. Il est venu à notre rencontre avec sa petite pirogue pour nous souhaiter la bienvenue.

Puis le bal des visites a commencé, rendant les classes du matin un peu plus difficiles mais bon il y a longtemps qu'ils n'ont pas eu de visiteurs alors leur curiosité était bien compréhensible. Nous ne sommes que le troisième bateau à passer en cette nouvelle saison. Je suis désolée de ne pas avoir fait mes devoirs pour offrir à nos lecteurs une description du pays avec son histoire, sa géographie, sa politique son économie et tout mais je n'ai aucune documentation à cet effet alors j'irai tout simplement de nos impressions.

Les Papous sont très souriants et accueillants. Bien que curieux, ils se montrent assez timides et nous approchent avec beaucoup de respect. Ils sont venus, tour à tour, hier nous offrir des biens à échanger. L'un avec des citrons, l'autre avec des limes, puis des bananes, un autre avec trois oeufs, des papayes, fruits de la passion des sculptures et le dernier de la journée avec une superbe langouste, comme on en avait vu à vendre en Australie au marché de poisson, pour la modique somme de 80.00$ le kilo. Quelle chance!

La devise monétaire ici est le kina, mais inutile de dire que tout comme dans les Vanuatus, ils n'ont que faire de notre argent. Au contraire, ce qu'ils recherchent ce sont les échanges. Ils veulent des bonbons, des vêtements, des livres d'école et crayons, des crochets de pêche, du fil, du sucre, des pointes pour la pêche sous-marine, etc.

Pour nous c'est parfait, car de un, nous n'avons pratiquement plus de fruits et légumes et de plus, nous avons en réserve plusieurs items que l'on se gardait justement pour les échanges. Je leur ai demandé le pourquoi de leurs dents et langue rouges et ils m'ont expliqué qu'ils mâchent un mélange de noix appelée (beatle) avec un autre fruit appelé (mustard), le tout mêlé à une poudre de corail (lime) qui donne la couleur rouge et qui brûle apparemment les lèvres. Ce mélange qu'ils mâchent agit comme anabolisant, ils le mâchent donc pour l'effet qu'il procure.

L'ennui c'est que de plus en plus, ces Papous souffrent d'un cancer de la bouche dû à cette pratique. Sur l'île, vivent de 500 à 600 personnes mais nous sommes du côté sauvage où ne vivent pas plus d'une centaine d'habitants, installés dans des maisons de paille, surélevées sur pilotis.

Le village où il y a l'école, l'église, petit magasin général et autre est à 30 minutes de marche, sur l'autre flan de la montagne. Je ne connais pas le nom de leur dialecte mais les adultes s'expriment très bien en anglais. Ils l'apprennent au cours du primaire, une fois qu'ils savent écrire leur propre langue.

Notre journée d'hier fut riche en poisson car nous avions pêché deux bonites que j'ai préparé en accras pour le dîner et pour le souper nous avions un surf & turf (steak et langouste). Encore ici, c'était une première pour notre équipier qui n'avait jamais goûté de langouste avant. René a passé quatre heures sous l'eau ce matin avec trois locaux mais il est revenu bredouille car il leur a laissé le poisson puisqu'il y retournera ce soir avec deux locaux et Thomas pour une pêche de nuit.

Evidemment c'est la langouste qui intéresse notre capitaine. Hier, un local nous a emmené voir un puit d'eau où on peut faire notre lessive. Cet PM, René et Thomas sont plongés sur une épave d'avion japonais (Japanese zero fighter plane) datant de la deuxième guerre mondiale.

Bref, on s'amuse bien mais surtout, nous sommes contents de faire connaître à Hugo la vie des îles à son état le plus sauvage. Ça fait du bien de quitter la grand ville et de ranger le porte-monnaie un peu, pour retrouver le calme et la sérénité des îles.

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